« Qu’est-ce que tu dirais, toi si t’étais là… », « Je te jetterai des sorts pour que tu m’aimes encore »… L’Amour avec un grand A… Il a été chanté, écrit, décrit, joué, crié, murmuré pleuré… Qu’on l’imagine sous les traits de Cupidon avec son arc et ses flèches, ceux d’Apollon avec les Dieux du Stade, ou ceux de l’homme de ses pensées, l’amour fait couler autant de larmes que d’encre. Même en couple, il nous arrive de regarder ailleurs, à la recherche du grand Amour. Que voulons-nous ? Un protecteur ? Un amour inconditionnel ? Un complice ? Un partenaire ? Combler un manque ?
Pourquoi vivre en couple ?
Dans notre société, vivre en couple est la normalité. C’est même le fantasme de 90% de français, alors que vouloir vivre seul est suspect. A l’instar de certaines variétés d’oiseaux, l’Homme semble bien décidé à faire sa vie à deux pour fusionner avec l’autre. Pourtant, dans la réalité, chaque jour en France, 356 divorces sont prononcés. Vivre en couple, c’est une façon de répondre à nos besoins fondamentaux : sécurité, prédictibilité, stabilité ; ce qui entre en totale contradiction avec nos désirs avoués : surprise, mystère, nouveauté… C’est s’assurer la présence à nos côtés de celui qui nous aidera à élever les petits en allant chasser et en réparant le nid. C’est aussi satisfaire son besoin d’amour et de reconnaissance et fuir la solitude qui nous confronte à nous-mêmes. Et c’est aussi la recherche de l’âme sœur. Ne dit-on pas « ma moitié » ? D’ailleurs, connaissez-vous le mythe de l’androgyne ? « Jadis notre nature n’était pas ce qu’elle est à présent, elle était bien différente. D’abord il y avait trois espèces d’hommes, et non deux, comme aujourd’hui : le mâle, la femelle et, outre ces deux-là, une troisième du nom d’androgyne composée des deux autres, mâle et femelle réunis. Ayant provoqué la colère des dieux, ils furent punis par Zeus qui les sépara chacun en deux moitiés ». (Le Banquet de Platon). Une approche qui explique le phénomène amoureux et la recherche perpétuelle de l’autre. De sa moitié. De celui ou de celle qui complètera l’être incomplet que nous sommes ou plutôt que nous pensons être…
Choyer son couple pour le faire durer
Les spécialistes du couple et de la relation sont tous d’accord sur ce point : un couple qui dure est un couple dont on s’occupe. Ce qui veut dire qu’au-delà de l’idée d’aimer l’autre, c’est le couple qu’il faut aimer. Nourrir la relation demande de l’attention et… de l’amour de soi ! Helen Fisher, anthropologue, chercheuse en comportement humain et auteure, entre autres, de « L’Anatomie de l’Amour » a mené une étude sur des personnes amoureuses. L’IRM a montré que plusieurs régions du cerveau réagissaient à la présentation d’une photo de l’être aimé, mais que l’une d’elles était particulièrement active : celle qui réagit à une injection de cocaïne ! « J’ai réalisé que l’amour n’est pas une émotion, mais un besoin. » Pour Helen Fisher, « s’il est une époque dans l’histoire de l’humanité où nous avons l’occasion de réussir nos mariages, c’est aujourd’hui. Bien sûr, il y a toujours des écueils. Les trois processus cérébraux : le désir, l’amour et l’attachement ne se combinent pas toujours parfaitement. C’est pour cela que les relations sexuelles occasionnelles ne sont pas toujours si désinvoltes. Au cours de l’orgasme, il y a un pic de dopamine. La dopamine étant associée à l’amour, vous avez des chances de tomber amoureuse d’une personne avec qui vous couchez occasionnellement. Avec l’orgasme, vous avez une montée d’ocytocine et de vasopressine, ces deux-là sont associés à l’attachement. C’est pour cela qu’on ressent parfois un sentiment d’union cosmique avec quelqu’un, après avoir fait l’amour. » Elle ajoute « L’amour est en nous. Il est profondément implanté dans notre cerveau. Notre défi, c’est de nous comprendre mutuellement. Je crois que le bonheur que nous trouvons, nous le fabriquons. Et je pense que nous pouvons tisser des bons liens entre nous. » Pour Alain Valtier, psychiatre, psychanalyste, psychothérapeute de couple et auteur de « La Solitude à Deux » (Odile Jacob) et de « l’Amour dans les Couples », un couple qui dure ne le doit pas à l’amour, mais au lien qui réunit deux personnes. « L’amour doit se transformer pour durer. Pour inventer un couple, il faut savoir vivre seul, éviter de projeter sur l’autre ses propres sentiments ».
Et le désir dans tout ça ?
Encore une histoire de liens, de relation, de connexion… En amour, nous attendons d’une seule personne ce qu’une communauté entière ne pourrait nous donner. Nous voulons à la fois la proximité et la fusion. L’intensité et le confort. La familiarité et la nouveauté. La prédictibilité et la surprise… Puis, lorsque la passion s’apaise, ce sont les habitudes qui prennent le pas. Or, le désir a besoin de nouveauté. Comme le feu a besoin d’air, le désir a besoin d’espace pour s’exprimer… Quand la routine s’installe, le désir s’éteint. On oublie de nourrir le quotidien de ces attentions qui faisaient la richesse de la relation et l’autre finit par faire partie du décor. Le désir disparaît à mesure qu’on ne se touche plus et nous éprouvons le besoin d’autre chose… Pour Esther Perel, psychothérapeute et auteure de « l’Intelligence Érotique » (pocket) et de « Mating in captivity » (l’Amour en captivité) la crise du désir est souvent une crise de l’imagination. « Je suis allée dans plus de vingt pays au cours des dernières années pour mes recherches pour “l’Amour en Captivité”, et j’ai demandé aux gens : » à quel moment votre partenaire vous attire-t-il le plus ? » J’ai eu 3 groupes de réponses :
- » Quand elle/il est loin, quand on est séparés, quand on se retrouve »
- » Quand elle/il est dans son élément, qu’il fait quelque chose qui la/le passionne, quand elle/il est le centre de l’attention »
- » Quand je suis surpris.e, quand on rit ensemble, quand il y a de la nouveauté »
Les couples qui ont fait durer le désir savent qu’il y a un espace érotique qui appartient à chacun d’entre eux. Ils savent aussi que les préliminaires ne commencent pas cinq minutes avant l’acte sexuel lui-même, mais plus ou moins à la fin du précédent orgasme ! Ils savent qu’un espace érotique est un espace où on cesse d’être un bon citoyen responsable qui s’occupe de tout. Ils comprennent aussi que la passion a des hauts et des bas… » Aimer son couple, c’est aussi veiller à maintenir en vie le désir, l’admiration et la surprise. C’est se débarrasser de l’anxiété pour s’ouvrir au jeu, à la nouveauté (et je ne parle pas de sex toys !). Avoir une vie sexuelle épanouie, c’est avoir des relations de qualité. Avec soi d’abord, car il faut s’aimer pour s’ouvrir au plaisir.
A la recherche de l’âme sœur…
Claire Deprey, conseillère conjugale, 50 ans, fiancée à 19 et mariée à 20, considère le jour de son mariage comme sa 2ème date de naissance. Elle découvre que son couple lui offre un formidable espace de liberté pour s’exprimer. « Nous étions tous les 2 animés par le même désir : que notre couple s’inscrive dans la durée. Alors nous nous sommes attelés à ce que notre relation reste idéale. Nous sommes devenus co-responsable de notre bonheur et de notre relation. Mais rien n’est jamais acquis. La seule chose dont nous sommes sûrs, c’est que ces 30 années de vie commune auront été des années d’épanouissement personnel extraordinaire et j’espère que pendant les 50, 60 70 prochaines années nous allons continuer à apprendre à nous connaître pour mieux nous comprendre. Continuer toujours à mieux communiquer pour garder ce lien. Apprendre toujours à occuper la bonne place pour nous respecter ».
Les règles de vie mises en place par Claire Deprey :
1 – Apprendre à se connaître. Comment un homme et une femme qui vivent ensemble peuvent-ils se connaître et se comprendre s’ils ne partagent pas leur fragilité, leur force ? Au début d’une relation, on se parle, on se confie, on s’écoute. Aller à la rencontre l’un de l’autre permet de se libérer du poids de nos blessures. 2 – Apprendre à Communiquer. Nous vivons dans un monde d’hyper communication et pourtant les couples vivent un véritable déficit de communication. Quand il n’y a plus de partage, chacun vit l’un à côté de l’autre avec ses frustrations, ses questions, ses rancunes La communication se confond avec les jugements, les reproches, les exigences, alors qu’elle suppose une écoute active et mutuelle. 3 – Trouver la juste place dans son couple et sortir de la dépendance affective. Quels sont les rôles que vous vous êtes distribués inconsciemment ? Quelle est votre demande affective ? On s’installe parfois dans des rôles où nous ne sommes pas à l’aise. Dans une histoire de couple, il arrive qu’il y ait un dominant et un dominé. Il arrive aussi que l’on ait un tel besoin de reconnaissance et d’amour que l’on tombe dans la dépendance affective si le besoin n’est pas clarifié. Or, une demande affective insatiable envahi l’espace vital de l’autre.